La Russie et la Biélorussie ne sont plus les bienvenues dans le sport international. Les annonces de retrait des compétitions programmées en Russie au cours des prochaines semaines et prochains mois se multiplient. Pour avoir « rompu la trêve olympique » au grand dam du Comité international olympique (CIO), la Russie se retrouve ostracisée par la communauté internationale. Ses athlètes, mais aussi ses entreprises, parties liées au soft power de Vladimir Poutine depuis des années. Dans un communiqué lapidaire, l’UEFA annonce l’arrêt avec « effet immédiat » du contrat de sponsoring avec Gazprom, symbole d’une ère révolue.
Alors que la FIFA et l’UEFA suspendent les clubs et les équipes nationales russes de toute compétition (donc de la Coupe du monde au Qatar et des Coupes d’Europe en cours), que la FIVB retire à la Russie l’organisation du prochain Championnat du monde de volley-ball, auquel la Pologne (tenante du titre) et la France (championne olympique) ne voulaient pas participer, la confédération européenne met fin à un partenariat encombrant avec Gazprom.
« L’UEFA a décidé aujourd’hui (lundi 28 février, ndlr) de mettre fin à son partenariat avec Gazprom dans toutes les compétitions », indique l’UEFA. « La décision prend effet immédiatement et couvre tous les accords existants, dont ceux concernant l’UEFA Champions League, les compétitions par équipes nationales de l’UEFA et l’UEFA EURO 2024 ». La décision était attendue tellement la pression politique était forte pour pousser l’UEFA à interrompre sine die un contrat renouvelé en 2021 et qui courait jusqu’en 2024. Le géant du gaz, détenu majoritairement par l’État russe, était partenaire de l’UEFA depuis 2012. Un contrat plus que symbolique, c’est-à-dire de la catégorie des poids lourds avec son montant estimé à 40 M€ annuels !
Un maillot « collector » mis en vente par le club
Pour Schalke 04, renoncer à Gazprom a également dû être douloureux. C’était l’un des partenariats les plus longs du football européen. Sponsor historique de Schalke 04 depuis 2007, la firme russe a vu son contrat être cassé par le club allemand en raison de la guerre en Ukraine.
Dans un premier temps, Schalke 04, soutenu depuis des années par le géant gazier russe, n’entendait rien changer à son association. Comme en 2014, lors d’une précédente crise diplomatique avec la Russie lors du rattachement de la Crimée, le club allemand réitérait sa fidélité à Gazprom. Saluant un « partenaire fiable » et un fournisseur de gaz important de l’Allemagne, Schalke 04 assurait « observer l’évolution de la situation » entre la Russie et l’Ukraine et préférait souligner que son contrat de sponsoring était officiellement signé avec la filiale allemande de Gazprom, à savoir Gazprom Germania. Un raisonnement inaudible.
À l’image du changement de doctrine du gouvernement allemand au cours des derniers jours, le club de Gelsenkirchen a révisé sa position. Deux jours après avoir joué un match avec un maillot vierge de tout sponsor face à Karlsruhe, Schalke 04 a annoncé la fin de son partenariat avec Gazprom : « Le conseil d’administration et le conseil de surveillance du FC Schalke 04 sont parvenus à un accord pour mettre fin prématurément au partenariat avec Gazprom, explique le club. Cette décision n’affecte pas les capacités financières du club. La direction du club est confiante pour l’annonce d’un nouveau partenaire dans un futur proche. »
Si Schalke 04 affirme pouvoir faire face à l’interruption impromptue de son contrat avec son partenaire de presque toujours, il n’a pas hésité, avec une petite pointe de cynisme, à annoncer la commercialisation de son un maillot floqué « Schalke 04 » avec un stock annoncé à 7.000 exemplaires au tarfi de 69,95 €.
Les Red Devils renoncent à la fin du contrat Aeroflot
Manchester United, dont le contrat avec Aeroflot arrivait en bout de course en juin prochain, a préféré prendre les devants et se séparer de la compagnie aérienne d’aviation russe avec effet immédiat. De toute façon, Aeroflot est interdit de vol quasiment partout.
Adidas suspend son partenariat avec la Russie
Adidas a pour sa part suspendu son partenariat avec la Fédération russe de football en raison de l’invasion de l’Ukraine. « Adidas suspend avec effet immédiat son partenariat avec la Fédération russe de foot-ball », a déclaré un porte-parole de l’entreprise, qui a réalisé en 2020 2,9% de son chiffre d’affaires dans la région Russie.
Alisher Usmanov sanctionné par l’UE
Les oligarques sont également dans le viseur des institutions. Moins connu du grand public que Roman Abramovitch, Alisher Usmanov a vu ses avoirs gelés par l’Union européenne en raison de ses « liens particulièrement étroits avec le président russe Vladimir Poutine ». Président de la fédération internationale d’escrime (FIE), ancien actionnaire d’Arsenal, Usmanov est aussi un soutien important d’Everton. Le milliardaire russe sponsorise le complexe d’entraînement Finch Farm du club pour un montant de 6 millions de livres. MegaFon, une société dont Usmanov est l’actionnaire majoritaire, sponsorise les femmes d’Everton.
Le sport mondial, qui s’accommodait parfaitement jusqu’ici du style de gouvernance de Vladimir Poutine, va-t-il désormais devoir renoncer à certains partenaires sulfureux ? Les critères d’engagement vont changer. Le marché mondial du sponsoring pourrait en être structurellement affecté. C’est l’une des conséquences inattendues de ce conflit armé mené par la Russie en Ukraine.