France 2 et France 3 sont condamnées par la cour d’appel de Paris à payer 75.000 euros de dommages-intérêts au Comité national contre le tabagisme (CNCT) qui les poursuivait pour publicité illicite en faveur du tabac lors du Paris-Dakar 2005. L’autorisation donnée aux chaînes de télévision de retransmettre les compétitions de sport mécanique, en vertu de l’article L. 3511-5 du Code de la santé publique, doit être limitée aux strictes besoins de l’information sportive sur la course et son environnement, donnée en temps réel ou dans des situations proches du temps réel.
En 2005, le CNCT avait assigné France Télévisions, estimant que cette dernière s’était rendue coupable de publicité illicite en faveur du tabac en violation de l’article L. 3511-3 du Code de la santé publique, avec la diffusion d’images de marques et logos de cigarettes Gauloises sur les antennes de France 2 et France 3 lors de l’édition 2005 du rallye automobile du Paris-Dakar. Le Tribunal de grande instance ayant relaxé les prévenus, le CNCT avait interjeté appel. Dans un arrêt du 24 septembre 2007, la Cour d’appel de Paris rappelle tout d’abord que le Code de la santé publique, au-delà du principe général d’interdiction de toute publicité directe ou indirecte en faveur du tabac, prévoit une exception en son article L. 3511-5.
Le texte dispose en effet que la retransmission des compétitions de sport mécanique qui se déroulent dans des pays où la publicité pour le tabac est autorisée, peut être assuré par les chaînes de télévision. Le CNCT soutenait à cet égard, que les chaînes ne pouvaient assurer la retransmission des images du Paris-Dakar 2005 se déroulant au Maroc dans la mesure où ce pays avait adopté une législation interdisant la publicité pour le tabac. Sur ce point, l’arrêt constate qu’une telle législation existe effectivement au Maroc, ce qui aurait dû interdire aux chaînes de France Télévisions de retransmettre des images du Dakar se déroulant dans ce pays. Mais les juges d’appel saisissent l’occasion pour interpréter la volonté du législateur concernant la portée de l’exception de retransmission des compétitions de sport mécanique. Ils considèrent que cette dérogation qui ne bénéficie qu’aux seuls médias télévisuels, la presse écrite restant soumise à l’interdiction, nécessite une grande vigilance sur toute éventuelle différence de traitement non justifiée entre les deux types de médias. Or, même si l’article L. 3511-5 du Code de la santé publique ne distingue pas expressément le direct et le différé, pas plus qu’il ne précise le terme de compétition, la cour d’appel estime que l’autorisation donnée aux chaînes de télévision doit être limitée aux strictes besoins de l’information sportive sur la course et son environnement, donnée en temps réel ou dans des situations proches du temps réel. Une telle autorisation ne saurait donc s’étendre aux rediffusions d’images intervenant plusieurs heures ou plusieurs jours après l’épreuve alors qu’il est techniquement possible de sélectionner des plans ou d’intervenir pour éviter ou dissimuler les références aux marques de produits du tabac ou logos rappelant ces marques.
En l’occurrence, l’arrêt retient que les retransmissions d’images faisant apparaître des références, par mention de la marque ou du célèbre logo du casque ailé, aux cigarettes Gauloises dans des journaux télévisés, lors des interviews des pilotes Gauloises hors arrivée de l’étape, lors de rediffusions dans différentes émissions ou lors des génériques ou bandes annonces, sont contraires aux prescriptions des articles L. 3511-3 et L. 3511-5 du Code de la santé publique. Compte tenu du caractère hautement litigieux de la diffusion d’images relatives aux compétitions de sports mécaniques largement sponsorisées par les fabricants de tabac, la cour d’appel considère qu’il appartenait aux chaînes de télévision concernées de prendre toutes les précautions utiles pour respecter et faire respecter la législation en cause.
Dans ces conditions, l’arrêt retient que la violation en connaissance de cause d’une prescription légale suffit à caractériser l’élément intentionnel de l’infraction. La Cour d’appel fait ainsi droit aux demandes du CNCT et condamne France 2, France 3 et France télévisions ainsi que Marc Tessier, président directeur général à l’époque.