La consultation sur les jeux d’argent et de hasard lancée par la Commission européenne doit permettre de parvenir à une réflexion et l’impact qui en résulte sur le domaine sportif. En effet, le sport est le secteur le plus concerné via l’essor des paris sportifs avec 32% des recettes brutes des jeux en ligne, soit le service le plus important du secteur.
Par Loïc Alves, Chargé de projets, think tank Sport et Citoyenneté
Notre think tank tient à rappeler que le sport est un secteur économique spécifique qui repose sur divers principes et valeurs tels que l’équité, l’incertitude des résultats ou l’interdépendance entre les acteurs. La fraude, le blanchiment d’argent ou le trucage de matchs sont autant de risques. C’est dans un souci de protection de cette spécificité que doit s’inscrire le rôle de l’Union européenne.
Deux problématiques se dégagent, celle du financement du sport grâce aux revenus générés par les jeux de loterie et les paris sportifs, et celle de la protection de l’intégrité des compétitions contre des manipulations liées aux paris.
Concernant le financement, le système européen repose sur un principe de solidarité. Les sommes d’argent que génèrent les paris sportifs en ligne ne doivent pas seulement profiter aux clubs professionnels. Le modèle français doit servir d’exemple avec un système de prélèvement sur les paris afin qu’une redistribution au profit du sport de masse soit instauré. Si tel n’est pas le cas, le fossé entre le sport de haut niveau et le sport amateur continuera de se creuser. L’instauration d’une organisation européenne chargée de la redistribution des sommes générées est une solution. Une autre possibilité pourrait être un droit de propriété intellectuelle sur les manifestations au profit des organisateurs, à l’image de ce qui est fait en France via le droit d’exploitation.
Le multi-parrainage, source de conflit d’intérêts
Nous tenons à mettre en garde les décideurs du risque de ce que l’on pourrait appeler le multi-parrainage. En effet, les opérateurs de paris en ligne concluent des contrats de sponsoring avec plusieurs sociétés sportives, parfois amenées à se rencontrer lors de compétitions donnant lieu à des paris en ligne. Une telle situation conduit clairement à un risque de conflit d’intérêts. Cette problématique permet également de soulever l’idée d’un sponsoring responsable. Un système de prélèvement sur le montant des contrats au profit du sport amateur pourrait être mis en place. Une autre hypothèse serait de mettre en place une fiscalité avantageuse au profit des sociétés souhaitant s’investir dans des clubs sportifs amateurs.
Notre think tank est conscient de la difficulté pour l’UE de parvenir à une harmonisation car la compétence en matière sportive appartient aux Etats membres et le secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne est exclu de la directive 2006-123 relative aux services dans le marché intérieur. Cependant, deux bases juridiques pourraient être utilisées.
– L’article 165 du TFUE qui dispose que l’UE contribue à la promotion des enjeux européens du sport, tout en tenant compte de ses spécificités, de ses structures fondées sur le volontariat ainsi que de sa fonction sociale et éducative.
– L’article 83 du TFUE pourrait permettre à l’UE de mettre en place une pénalisation de la fraude sportive au sein du système juridique de chaque Etat membre via l’adoption d’une directive.
Nous sommes également conscients que la dimension spécifique du secteur rend l’intervention compliquée, une coopération entre l’UE, les Etats membres, le mouvement sportif et les opérateurs légaux de paris sportifs en ligne est nécessaire afin de parvenir à une solution efficace.
Loïc Alves