La Premier League veut attaquer en justice, aux Etats-Unis, le site d’échanges de vidéos YouTube, filiale de Google, qui s’approprie de manière infondée et en toute connaissance de cause des images du championnat anglais de football. A l’inverse, les ligues professionnelles américaines jouent le compromis. Explications.
Il perturbe l’ordre mondial des médias classiques. Google se taille désormais une place de choix parmi les grands groupes de communication. Mais cette réussite du leader des moteurs de recherche sur Internet ne plaît pas à tout le monde. En particulier aux détenteurs de droits. Fin octobre 2006, Premier League, l’organisme qui gère l’élite du football anglais, avait écrit à YouTube, filiale de Google, pour lui demander d’enlever tout document mis en ligne en violation de (ses) droits de propriété et de ceux de (ses) partenaires, clubs ou chaînes.
Quelques mois plus tard, Premier League change de ton et veut engager une action devant un tribunal de New York. La défense, qui possède et exploite YouTube, s’est appropriée de manière infondée et en toute connaissance de cause un avoir de valeur pour son propre profit, sans rien payer et sans autorisation des détenteurs de la propriété intellectuelle, selon la plainte citée par la radio BBC.
D’autres détenteurs de droits s’étranglent devant l’insolence du nouveau champion des médias. Après lui avoir adressé un ultimatum exigeant le retrait des contenus lui appartenant, le groupe américain de télévision et cinéma Viacom (chaînes MTV, Comedy Central, studios Paramount…) a décidé lui aussi en mars d’attaquer en justice Google et sa filiale YouTube (qui détenait, fin 2006, près de 41% du marché américain de la vidéo en ligne) pour piratage, en leur réclamant un milliard de dollars d’indemnités. Selon Viacom, quelque 160.000 vidéos lui appartenant, ont été visionnés 1,5 milliard de fois par les utilisateurs de YouTube (les contenus protégés par des droits d’auteur représenteraient 70% des vidéos les plus regardées).
Google contre-attaque en déclarant que la plainte de Viacom contre YouTube menace le fonctionnement même d’Internet. Google affirme qu’en cherchant à faire poursuivre les fournisseurs d’accès et les hébergeurs pour les communications sur internet, la plainte de Viacom menace la façon dont des centaines de millions de personnes échangent légitimement des informations, du divertissement et des expressions politiques et artistiques. La plainte de Viacom met en danger l’équilibre délicat établi par le Congrès quand il a adopté la loi sur la propriété intellectuelle Digital Millennium Copyright Act (DMCA), argue Google. Le DMCA limite la responsabilité des fournisseurs d’accès et des hébergeurs si ceux-ci agissent rapidement pour bloquer l’accès à des contenus pirates quand un détenteur des droits les en avertit.
La NBA et YouTube s’entendent
Tous ne font pas le choix d’un affrontement judiciaire. Le site d’échange de vidéos sur internet et la NBA ont par exemple annoncé en février dernier avoir signé un accord pour l’utilisation par le site des images de la ligue nord-américaine de basket-ball. Cet accord donne à la NBA la possibilité de retirer du site des vidéos dont elle est propriétaire et lui offre un espace NBA Channel sur le site YouTube. Sur cet espace, les fans de basket peuvent accéder aux images de la NBA et envoyer leurs propres vidéos, sous contrôle de la NBA. Cet accord est le résultat de négociations qui avaient débuté après que la NBA avait demandé en novembre à You Tube de retirer les images. En novembre, les dirigeants de la NHL, la ligue de hockey sur glace, avaient passé le même genre d’accord. La NHL fournit au site des vidéos gratuites et de courte durée dans son propre espace dédié.
Le cas du club anglais de Chelsea, qui a annoncé le lancement d’une chaîne sur le site d’échange de vidéos, est trop isolé pour inverser la tendance. YouTube, acheté l’année dernière 1,65 milliard de dollars sans avoir dégagé un seul centime de bénéfice de son histoire, a des allures de Napster. Ce site d’échange de fichiers musicaux avait défrayé la chronique au coeur de la folie Internet. En rachetant le trublion, l’Allemand Bertelsmann avait essuyé une cascade d’actions en justice, vidant peu à peu Napster de sa substance.