La saison 2008-2009 n’a pas été bonne pour les clubs de football français. D’après le rapport annuel de la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG), la Ligue de football professionnel (LFP) indique que, pour la première fois depuis trois ans, le résultat net cumulé des 40 clubs (Ligue 1 et Ligue 2) présente un déficit de 50 millions d’euros ramené à 33,54 millions d’euros après abandon des comptes courants des actionnaires.
Malgré le sérieux de leur gestion, les clubs professionnels sont frappés durement par la crise, commente la LFP. Il faut que les pouvoirs publics prennent pleinement conscience de cette situation et reviennent sur les décisions récemment prises, notamment sur la suppression du Droit à l’image collective (DIC), qui fait courir un risque considérable pour l’équilibre économique à long terme du football professionnel. Un raisonnement trop simpliste.
Un chiffre d’affaires record dans un contexte difficile
Globalement, le football professionnel français affiche une progression de 5% de son chiffre d’affaires à 1,27 milliard d’euros pour 2008-2009 grâce à la renégociation des droits de retransmission (NDLR : les droits audiovisuels de la Ligue 1, pour la période 2008-2012, représentent 668 millions d’euros par an, en moyenne sur quatre ans contre 640 millions d’euros par an en moyenne sur les trois années précédentes). Un résultat record pour le football français qui reste à bonne distance des championnats allemand, espagnol et Italiens. Quant à la Premier League anglaise, elle est simplement inaccessible. Mauvais point pour le football français : la hausse de son chiffre d’affaires se trouve en partie gommée par la surenchère salariale (+3%). Les émoluments (NDLR : le salaire mensuel brut moyen en L1 atteint 47.762 euros, 13.302 euros en Ligue 2) avaient déjà grimpé de 13% la saison précédente. Les charges poursuivent globalement leur progression, atteignant un niveau sans précédent de 1,585 milliard d’euros. Contrairement aux saisons précédentes, la hausse de la masse salariale n’est pas seule en cause. La progression est due également à la hausse des frais généraux et au coût des mutations (amortissements des indemnités de mutation).
A la hausse des salaires, il faut ajouter la diminution des excédents dégagés par les transferts, 215,5 millions d’euros en 2008-2009 contre 265,8 millions d’euros la saison précédente. Avec 50,3 millions d’euros de recettes en moins, le football français repasse donc dans le rouge. En Ligue 1, le montant du résultat net est de moins 14,68 millions d’euros, pour un chiffre d’affaires de 1,048 milliard d’euros. En Ligue 2, le résultat net est de moins 18,86 millions d’euros. Les produits hors mutation progressent (+3%) sous l’impulsion de la billetterie (+33%) mais ils ne compensent pas l’augmentation des charges d’exploitation, explique la LFP.
Le RC Lens se retrouve en grande partie responsable du déficit en L2. Reléguée la saison précédente, la formation a connu des difficultés à gérer une baisse significative de ses recettes. Ce qui a abouti à une perte de plus de 13 millions d’euros. En conservant une masse salariale digne de la L1, le FC Metz avait lui aussi fait le pari de la remontée immédiate. Résultat des courses : le club lorrain est resté en Ligue 2 avec un déficit de 8 millions d’euros. Certes, le RCL et le FC Metz sont très loin des 92,6 millions de livres (plus de 100 millions d’euros) perdus par Manchester City. Mais ni l’un, ni l’autre ne comptent la famille régnante d’Abou Dhabi comme principal actionnaire…
Un modèle à repenser
Il y a de quoi être inquiet pour les clubs français. La source de l’exportation de joueurs s’est tarie. Une tendance lourde. En premier lieu parce que la France a vendu ses meilleurs éléments et a du mal à se ressourcer. Ensuite parce que les clubs étrangers ont entamé une cure de régime. Les formations anglaises en particulier.
Le modèle économique français, basé sur le trading de joueur a du plomb dans l’aile. Pourtant, pour l’exercice en cours, les clubs anticipent encore 226 millions d’euros de cessions liées aux transferts.
Il conviendrait de prendre le problème à bras le corps. En cherchant d’abord à contenir la hausse des salaires qui représentent aujourd’hui 58% du chiffre d’affaires. La masse salariale chargée globale des clubs (salaires, charges sociales, participation et amortissement des indemnités de mutation) absorbe 86% des produits ! La baisse annoncée de 2% de la masse salariale pour la saison en cours va dans ce sens, mais elle n’est pas suffisante.
Les clubs pourraient chercher à développer leurs recettes propres. En construisant leur propre stade par exemple. Mais cette solution a le désavantage de n’être efficace qu’à long terme et, surtout, elle impliquerait un changement radical de politique des clubs.
A savoir ne plus être dépendant du bon vouloir des collectivités locales pour la mise à disposition d’équipements plus modernes. L’Olympique Lyonnais l’a compris, mais son exemple tarde à faire tache d’huile. Les perspectives sont pourtant alléchantes. Une récente étude de Sportfive, en extrapolant sur la création ou la rénovation de vingt stades neufs pour l’Euro 2016, arrivait à la conclusion d’un revenu additionnel de 183 millions d’euros annuels pour les équipes à l’horizon 2015.
Club par club, seuls Lyon et Bordeaux sont nettement bénéficiaires avec des résultats respectifs de 5 et 4 millions d’euros. Mais l’OL affiche tout de même une baisse de 75% de son résultat. L’Olympique de Marseille affiche également un résultat positif, à 1,4 million d’euros. Mais il suit une très mauvaise pente. Il était de 15 millions en 2006-2007, puis de 8 millions en 2007-2008. Traditionnel bonnet d’âne du rapport de la DNCG, le Paris SG laisse cette année cette place à Auxerre. Plus que les autres, l’AJA, club formateur, pâtit du retournement du marché des transferts avec un déficit de 7,7 millions d’euros. Le Paris SG, lui, continue de réduire ses pertes (à -5,4 millions), mais il cumule les déficits saison après saison. Un véritable puits sans fond : 165 millions de pertes cumulées sur les sept dernières saisons ! En même temps, le PSG, qui a plus que divisé par deux son déficit précédent (-12,2 millions d’euros au 30 juin 2008), s’est éloigné de son exercice record de 2003 lorsque le club parisien avait annoncé un déficit de 65 millions d’euros. Mais la machine à perdre, de l’argent, s’est remise en route. Les comptes prévisionnels de la saison en cours prévoient un déficit de 10 millions d’euros. On ne se refait pas.
Des clubs peu endettés
Au moins Colony Capital, l’actionnaire de référence du PSG, ne devrait pas être seul à perdre de l’argent cette saison. Pour la saison 2009-2010, les prévisions pour l’ensemble des clubs font apparaître encore une aggravation sensible du déficit qui atteindrait 100 millions d’euros malgré une baisse de la masse salariale prévue de 2%, d’après la LFP.
Toutefois, tout n’est pas rouge dans les comptes des clubs. Avec un endettement total de 60 millions d’euros pour l’ensemble des vingt formations de Ligue 1, l’élite se trouve paradoxalement moins fragilisée par la crise que les formations anglaises dont l’endettement cumulé dépasse le milliard de livres ou que les clubs espagnols qui traînent derrière eux une bombe à retardement de 3,4 milliards d’euros.