Il devait sagir dun projet de loi. Ce sera finalement une proposition de loi (voir la différence dans notre Point de droit, page 2). Et cest le député UMP de la Côte dOr, Bernard Depierre, qui sen est chargé. Déposée le 4 février à lAssemblée Nationale, la proposition de loi relative à lorganisation du championnat dEurope de football de lUEFA en 2016 comporte 4 articles sur le soutien apporté par les collectivités aux opérations réalisées en bail emphytéotique administratif (BEA) et sur le recours à larbitrage en dérogation aux dispositions du code de justice administrative.
«Créé en 1960, le championnat dEurope de football de lUEFA (Union européenne des associations de football) est organisé tous les 4 ans. Sur le plan sportif, beaucoup considèrent cette compétition de football comme la deuxième plus importante entre nations après la Coupe du monde, en raison de la qualité du jeu des équipes nationales européennes. Lenjeu daccueillir un tel événement est considérable, tant sur le plan médiatique, que sur le plan économique. La France a accueilli cette compétition en 1960 et 1984 et la remportée en 1984 et 2000», expose dans ses motifs Bernard Depierre, avant de rappeler que le 28 mai 2010, la France a obtenu lorganisation de lUEFA Euro 2016, devançant ainsi lItalie et la Turquie lors du vote du comité exécutif de lUEFA. «Cet événement accueillera pour la première fois 24 nations au lieu de 16 précédemment. La compétition touchera ainsi encore plus de spectateurs potentiels.»
Il ny a que deux stades de plus de 50 000 places
Faut-il encore le rappeler ? La France dispose du parc de stades ayant la plus faible capacité daccueil du public des cinq championnats majeurs de football en Europe. Sur la saison 2007/2008, la capacité moyenne daccueil du public sétablit à plus de 45 000 places pour lAllemagne, à plus de 40 000 pour lItalie, à plus de 35 000 pour lAngleterre, à plus de 30 000 pour lEspagne et à seulement 29 155 places pour la France. Seuls deux stades dépassent la jauge de 50 000 places, condition nécessaire mais non suffisante pour recueillir le label 5 étoiles fixé par lUEFA. Il sagit du Stade de France à Saint-Denis et du Stade Vélodrome à Marseille. «Ce fossé en matière de capacité daccueil des stades se répercute logiquement sur laffluence moyenne des stades lors des journées de championnats.»
«Mais il ny a pas quen termes de capacité que les stades français sont en retard, sinquiète Bernard Depierre. En matière de qualité daccueil et de niveau des prestations offertes, la France accuse aussi un handicap sur ses principaux concurrents européens. Il ny a là dailleurs rien détonnant, dans la mesure où les enceintes doutre-Manche et doutre-Rhin sont de conception plus récente (âge moyen respectif de 11 et 7 ans contre 17 ans pour la France) et donc mieux adaptées, à la fois aux attentes du public comme aux exigences des médias et des partenaires divers.»
Avec un seul stade noté 5 étoiles par lUEFA (le Stade de France) et seulement deux stades 4 étoiles qui sont le stade de Gerland à Lyon et le Parc des Princes à Paris, la France souffre de la comparaison.
LEspagne et lAllemagne ont 4 stades 5 étoiles, le Portugal possède 3 stades 5 étoiles et les Pays-Bas a 2 stades 5 étoiles. «Le confort et la qualité daccueil des enceintes françaises doivent donc être adaptés, en prévoyant notamment des espaces VIP, des loges privatives, une toiture protégeant des intempéries et en offrant une meilleure visibilité et un meilleur confort pour lensemble des spectateurs. En outre, la multifonctionnalité des stades est peu développée : la plupart dentre eux sont quasi exclusivement dédiés à la pratique du football et occasionnellement du rugby. Rares sont ceux qui sont en mesure daccueillir également des événements culturels. La multifonctionnalité est pourtant un enjeu essentiel afin de diversifier les ressources de lexploitant, de permettre un meilleur financement du coût de linfrastructure et une meilleure occupation au quotidien.»
Dans ce contexte, Bernard Depierre rappelle que les pouvoirs publics doivent prendre des mesures afin de favoriser la réalisation des grands équipements sportifs modernes dont la France a besoin pour répondre aux exigences de lUEFA en vue dorganiser le Championnat dEurope de football 2016, mais aussi pour conforter la compétitivité des clubs professionnels qui évoluent dans ces enceintes. «Dans ce but, outre laide au financement des projets de construction ou de rénovation des stades à hauteur de 150 millions deuros déjà annoncée par le Gouvernement, il apparaît nécessaire dadopter des mesures législatives qui permettent notamment que la répartition de cette somme soit effectuée dune manière équitable quelles que soient les formules juridiques retenues pour la construction.»
Les baux emphytéotiques subventionnés
«Larticle 1er permet aux baux emphytéotiques administratifs conclus dans le cadre de projets de construction ou de rénovation de stades destinés à accueillir lEuro 2016 de devenir éligibles aux mêmes aides que les projets réalisés sous le régime de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise douvrage publique et ses rapports avec la maîtrise duvre privée, souligne le député de la Côte dOr. Il sagit là dune disposition visant à rétablir la neutralité entre les différents modes de réalisation déquipements sportifs construits ou rénovés dans la perspective de lUEFA Euro 2016.» «Larticle 2 prévoit que les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent apporter des aides aux projets mentionnés à larticle 1er par dérogation à larticle L. 1511-2 du code général des collectivités territoriales qui confie au conseil régional la définition du régime ainsi que la décision doctroyer des aides aux entreprises ; aux articles L. 113-1 à L. 113-3 et L. 122-11 du code du sport qui instituent des plafonds daide et interdisent les garanties des collectivités territoriales aux associations et sociétés sportives». Enfin, Bernard Depierre indique que larticle 3 permet le recours à larbitrage pour les personnes morales de droit public pour les contrats en lien avec la construction ou la rénovation des enceintes sportives destinées à accueillir lUEFA Euro 2016 et des équipements connexes permettant le fonctionnement de celles-ci, ainsi quavec lorganisation et le déroulement de lUEFA Euro 2016.
La proposition de loi
Article 1er
Les projets de construction ou de rénovation des enceintes sportives destinées à accueillir lUEFA Euro 2016 ainsi que des équipements connexes permettant le fonctionnement de celles-ci, réalisés sous le régime du bail emphytéotique administratif, sont éligibles aux mêmes subventions, redevances et autres participations financières que sils étaient réalisés sous le régime de la loi n°85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise douvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise duvre privée. Les modalités de léchéancier de versement de ces subventions, redevances et autres participations financières peuvent être adaptées à la durée du bail emphytéotique administratif.
Article 2
Par dérogation aux dispositions de larticle L. 1511-2 du code général des collectivités territoriales, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent apporter des aides aux projets de construction ou de rénovation des enceintes sportives destinées à accueillir lUEFA Euro 2016 ainsi que des équipements connexes permettant le fonctionnement de celles-ci. Les dispositions des articles L. 113-1 à L. 113-3 et L. 122-11 du code du sport ne sappliquent pas aux aides accordées à ce titre.
Article 3
Par dérogation aux dispositions du code de justice administrative déterminant les compétences des juridictions de premier ressort, les contrats passés par les personnes morales de droit public en lien avec la construction ou la rénovation des enceintes sportives destinées à accueillir lUEFA Euro 2016 et des équipements connexes permettant le fonctionnement de celles-ci ainsi quavec lorganisation et le déroulement de cette même compétition, peuvent prévoir le recours à larbitrage avec application de la loi française.
Article 4
Les charges qui pourraient résulter pour lEtat de lapplication de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création dune taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. Les charges qui pourraient résulter pour les collectivités territoriales de lapplication de la présente loi sont compensées à due concurrence par le relèvement de la dotation globale de fonctionnement, et corrélativement pour lÉtat, par la création dune taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.