L’opération de naming de l’arena de la Porte de la Chapelle à Paris a été adoptée par le Conseil de Paris après des débats tendus. Malgré une majorité municipale divisée, le projet de baptiser le futur équipement olympique en « Adidas Arena » du nom de la firme aux trois bandes a été adopté avec 33 voix pour, 17 contre (des élus de gauche) et 26 abstentions. Il s’agira du premier naming d’équipement réalisé par la marque.
Le sujet était sensible et les débats au dernier Conseil de Paris l’ont confirmé. À rebours de la maire de Paris, Anne Hidalgo (PS), ni la majorité de gauche ni certains élus d’opposition ne soutenaient cette idée. « Nous avions la possibilité de recourir ou pas au naming, a attaqué Nicolas Bonnet Oulaldj, le patron des communistes, lors du débat. La possibilité, ce n’est pas une obligation. Cette pratique est tout droit sortie des cahiers du libéralisme. C’est concevoir les équipements sportifs comme une machine à fric. La prochaine étape, c’est quoi ? Les stations de métro ? Les arrêts de bus ? Les squares ? Les écoles ? Et pourquoi pas demain la Porte Maillot porte BNP ? ». Préalablement, il avait lancé une pétition pour contester ce choix. « Ne sacrifions pas nos valeurs, notre engagement pour le sport, sur l’autel d’une multinationale ! » plaidaient les signataires du texte.
Un « co-naming » rejeté
À la place d’Adidas, les opposants poussaient pour que cette Arena porte le nom d’Alice Milliat (1884-1957). La Française est devenue au XXe siècle une figure pour son combat dans la reconnaissance du sport féminin. Elle a notamment défendu la participation des femmes aux Jeux Olympiques alors que les dirigeants des instances y étaient à l’époque très hostiles. « L’Arena aurait ainsi été le premier équipement olympique portant le nom d’une femme. On passe à côté de l’histoire ! », tempêtait Nicolas Bonnet-Oulaldj. L’élu souligne avoir proposé la solution d’un « co-naming » que la firme a rejetée.
Les élus de droite ont choisi de s’abstenir sur le sujet. « Votre gestion budgétaire catastrophique vous contraint à vous rabattre sur cette dénomination au détriment d’une figure majeure du sport, qui plus est parisienne, afin de combler les carences de la maquette budgétaire de ces Jeux. Alors qu’il y avait d’autres pistes qui pouvaient être envisagées : on pouvait rallonger la délégation de service public, on pouvait rééquilibrer le montage du dossier en revoyant à la baisse la structure… Il y a plein de choses à faire », a dénoncé l’élu (LR) du XVIIIe, Rudolph Granier.
Pour tenter de calmer les esprits, la Ville de Paris a fait adopter une délibération pour donner le nom d’Alice Milliat à l’esplanade qui s’étirera devant l’équipement.
Un contrat record de 2,8 M€ par an
Dans le groupe de la majorité, Paris en commun, des voix se sont élevées pour défendre l’accord passé lors du conseil de la société d’économie mixte (SEM) qui exploite déjà l’Accor Arena et le Bataclan. En échange de cette appellation, une première pour la marque, Adidas versera près de 2,8 M€ par an sur cinq ans (2,32 M€ HT pour le « naming » stricto sensu et 282.000 € HT destinés à régler des prestations d’activation et de restauration, ndlr), un contrat renouvelable pour sept années supplémentaires. Le montant est sans équivalent en France, ni même en Europe, pour des arénas de dimensions similaires.
De quoi contribuer, selon la mairie, à l’équilibre économique de l’enceinte de 7.800 places, qui doit accueillir le badminton et la gymnastique lors des JO 2024, mais pas le basket-ball alors que le Paris Basket-ball en deviendra le club résident.
« Ces équipements sont structurellement difficiles à équilibrer. Le modèle du naming avait été choisi dès juillet 2019. Peut-être que dans un monde idéal nous aurions fonctionné différemment », a reconnu Pierre Rabadan. L’adjoint au sport a néanmoins souligné le « partenariat équilibré » de cette opération. En prime, « chaque année, Adidas financera à hauteur de 180.000 € des actions locales en faveur de la pratique sportive », insiste Maya Akkari, élue du XVIIIe.