Le conflit du travail qui agite le championnat de football américain de la NFL se règlera en justice après l’échec des négociations entre le syndicat des joueurs et les propriétaires de franchises. Les propriétaires décrètent le lock-out. L’enjeu : des centaines de millions de dollars.
Devant l’incapacité des deux parties (propriétaires de franchises et joueurs) à négocier une nouvelle convention collective, le syndicat des joueurs renonce à son pouvoir de négocier collectivement au nom de ses membres, decertification en anglais.
Comme le précédent accord de travail a expiré vendredi 10 mars sans résultat, les propriétaires répondent en décrétant le lock-out. Les joueurs ne peuvent plus avoir accès aux outils et lieux de travail (centre d’entraînement, stade, matériel…), ne peuvent plus communiquer avec leur équipe et le marché des transferts est gelé, même si la draft aura quand même lieu en avril. Surtout, le lock-out permet aux propriétaires de se libérer de leurs obligations salariales. Les joueurs ne sont donc plus payés. Trois des plus célèbres joueurs de NFL (Tom Brady, Peyton Manning et Drew Brees) ont répliqué par une action en justice pour contrer le lock-out sur la base de la loi antitrust. Le dernier arrêt de travail en NFL remontait à 1987. A l’époque, la grève de trois semaines avait obligé les clubs à faire appel à d’autres joueurs pour disputer des matches.
Les propriétaires ont provisionné 320 M$
Nous n’avons pas trouvé d’accord, mais je persiste à penser que c’est à la table des négociations et non dans une cour de justice que le problème se règlera au final, répond le patron de la NFL, Roger Goodell. Le début de la prochaine saison, en septembre, n’est pas encore remis en cause. Mais en raison des lenteurs inhérentes à la justice, la situation pourrait rapidement devenir critique. Nous réglerons le problème et nous le ferons sans annuler aucun match, promet le propriétaire des Dallas Cowboys, Jerry Jones. Les propriétaires se sont préparés à cette grève. Ils auraient provisionné 320 millions de dollars si l’absence de matches devait s’éterniser. Ils savent qu’ils pourront toujours compter sur l’argent de la télévision. La NFL est si puissante que le nouveau contrat télé de 4 milliards de dollars par saison, qui entrera en application la saison prochaine, ne sera pas remis en cause par la grève. Les joueurs aussi se sont préparés. Leur syndicat a mis de côté 60.000 dollars pour chacun de ses 1.500 membres.
Au coeur du conflit se trouve la répartition entre joueurs et propriétaires des 9,1 milliards de dollars annuels de recettes engendrés par la NFL. De cette somme, les propriétaires retranchaient l’an dernier 1 milliard de dollars (720 millions d’euros) et donnaient 60% du reste aux joueurs en salaires et bonus. Dans le prochain accord collectif de travail, les propriétaires veulent soustraire entre 800 millions de dollars et 1 milliard de dollars de plus de la somme dont peuvent bénéficier les joueurs et réviser le pourcentage de partage, au nom de la maîtrise des coûts. Ils souhaitent également ajouter deux journées supplémentaires à la saison régulière qui en compte 17. A 400 millions de dollars la journée jouée, on peut les comprendre. Mais les joueurs ont surtout compris qu’on leur proposait de travailler plus pour gagner moins…
La NBA aussi ?
La NBA se prépare elle aussi à un prochain lock-out. La multiplication des transferts au cours de l’intersaison n’était pas fortuite. Les joueurs ont intégré cette donnée dans leur plan de carrière. Ils ont préféré devancer l’appel alors que la prochaine convention collective leur sera sans doute moins favorable. Car à l’inverse de la NFL, la NBA perd de l’argent. Et oui, la toute puissante ligue nord-américaine, symbole du sport business à travers le monde, est un colosse aux pieds d’argile. Dix-sept des trente franchises perdent de l’argent selon la dernière estimation de Forbes. Comme en NFL, les propriétaires veulent réduire leur dépense et notamment la part consacrée aux salaires des joueurs. Actuellement, les joueurs perçoivent 57% des revenus générés par la NBA. Les propriétaires veulent ramener cette part à 40%.
La Ligue évitera-t-elle la grève alors que les négociations sont dans l’impasse depuis un an ? Comme la NFL, la NBA a en tête le précédent de la NHL. En 2004, cette dernière avait décrété le lock-out. Elle commence tout juste à s’en remettre. Les supporters acceptent les millions gagnés par les joueurs professionnels, mais ils n’aiment pas être privés de leur spectacle favori.