Avec une puissance financière incomparable, les nouveaux acteurs venus des télécoms inquiètent les télévisions, soucieuses de conserver les épreuves sportives dans leur grille des programmes. Mais quel est l’impact de ces nouveaux médias sur les droits TV ? Tel était le thème abordé lord du dernier Sportel.
La téléphonie mobile et Internet peuvent-ils bouleverser les relations entre les chaînes de télévisions et les détenteurs de droits sportifs ? Beaucoup le pensent. Mais la télévision n’a sûrement pas dit son dernier mot.
L’apparition des opérateurs de télécommunication dans les appels d’offres n’est déjà plus une nouveauté. Comme les chaînes TV, en particulier celles à péages, les opérateurs considèrent le sport comme un moyen de fidéliser le consommateur. Mais la question est plutôt de savoir quelles stratégies ces opérateurs vont-ils adopter dans le domaine des retransmissions sportives. Vont-ils chercher à obtenir des exclusivités, notamment de grandes compétitions, et entrer en concurrence frontale avec la télévision ? Vont-ils s’allier aux chaînes de télévision ? Et comment cette nouvelle donne va-t-elle modifier les stratégies de commercialisation des droits sportifs ?
Partenaires plus que rivaux
Autant de questions dont les acteurs concernés ont débattu à Monaco lors du 17e Sportel, marché du sport et de la télévision, qui s’est tenu la semaine dernière. La conclusion apparaît presque simpliste : les télévisions et les nouveaux entrants ne s’opposent pas mais sont au contraire partenaires. Les exemples fourmillent pour étayer cette thèse : TF1 et M6 programment la Coupe du monde de football quand SFR offre à ses abonnés de revoir les buts des matches ; ou encore France Télévisions qui diffuse Roland Garros, tandis qu’Orange propose des résumés des rencontres. Autre exemple de coopération entre les chaînes et les opérateurs : la Ligue 1. Après la razzia de Canal + sur les droits TV, Orange a négocié avec la chaîne cryptée pour la diffusion des buts du championnat. Depuis, Orange constate que 50% des connexions le week-end concernent la Ligue 1.
Les rôles s’inversent parfois. En Allemagne, c’est un opérateur de téléphonie, Arena, allié à Eutelsat, qui a remporté l’appel d’offres pour les droits TV de la Bundesliga (le championnat allemand de football professionnel). La chaîne Pre-miere s’est alors alliée avec Deutsche Telekom pour continuer à proposer à ses abonnés du football sur son antenne.
Savoir-faire des télévisions contre millions de télécoms
Si les chaînes de télévision ne bénéficient pas de la même puissance financière que les opérateurs des télécoms, elles peuvent mettre en avant leur savoir-faire. Les chaînes ont un traitement distinctif, un apport qualitatif et des moyens souligne Alexandre Bompard, directeur des sports de Canal +, et qui permettent de leur garantir (NDLR : aux ayant-droits) l’exclusivité du direct, élément essentiel dans les retransmissions sportives. Un match de football, sur Canal +, est un programme à part entière, détaille encore M. Bompard : une retransmission mobilise vingt-cinq caméras et une centaine de personnes, et coûte en moyenne 200.000 euros.
La télévision reste et restera le média incontesté
Une étude de Médiamétrie va dans le même sens. Si ces nouveaux supports sont de belles opportunités pour les sports annexes, qui ont peu droit de cité sur les grandes chaînes, pour les sports les plus populaires la télévision reste et restera le média incontesté comme principale source d’information, aussi longtemps que les grandes compétitions internationales ou nationales seront diffusées sur des chaînes accessibles à tous, indique Médiamétrie.
La Coupe du monde de football se vend sur sa valeur et doit être vue par tout le monde. Nous avons des obligations avec nos sponsors, indique Jérôme Valcke, directeur du marketing et des droits télé à la FIFA. La Fédération internationale de football privilégie donc les télévisions. En contrepartie de l’exclusivité, l’opérateur doit garantir 95% de diffusion sur son territoire, et montrer 40 matches en clair sur les 64 à l’affiche. La FIFA a le droit de geler les droits sur les mobiles si l’opérateur ne les prend pas.
Même son de cloche du côté du Comité international olympique (CIO). Rien ne changera (dans la stratégie de vente des droits) avant 2012, a assuré le président de la commission marketing du CIO Gerhard Heiberg. Mais, M. Heiberg a toutefois ouvert la porte pour l’après 2012, avec l’idée de commercialiser à part les droits nouveaux médias, même si comme l’a martelé Lord Sebastian Coe, organisateur des JO de Londres 2012, l’argent de la télévision doit rester le nerf de la guerre.
Le succès de masse relève de l’utopie
Le public veut des spectacles qualitatifs et au traitement personnalisé, insiste Alexandre Bompard. Ce que nous offrons. Les autres supports de distribution représentent un phénomène fort, mais leur succès de masse relève de l’utopie. Analyse pertinente ou conviction subjective ? L’avenir le dira…