Il y a un an, la Berrichonne de Châteauroux passait sous pavillon saoudien avec le rachat du club castelroussin, aujourd’hui en National, par le prince Abdullah bin Mosaad et son United World Group. Pourquoi cette opération ? Comment Châteauroux a-t-il négocié cette opération quand tant d’autres clubs en France peinent à attirer des investisseurs solides ? Quelle est l’ambition d’United World Group ? Confirmé dans son rôle de président du club par les nouveaux actionnaires, Michel Denisot a répondu aux questions de Sponsoring.fr.
Sponsoring.fr Pourquoi la Berrichonne de Châteauroux était-elle à la recherche d’un nouvel investisseur ?
Michel Denisot. C’était la fin d’un cycle. Nous étions 25 petits actionnaires à l’origine de la constitution de la société de la Berrichonne il y a très longtemps. Nous sommes maintenant à la fois vieillissants et aucun d’entre nous n’était en capacité de réaliser les investissements dont a besoin la Berrichonne, ni en capacité de couvrir les besoins financiers d’un club professionnel de football. Nous avons donc décidé de nous mettre en quête d’un partenaire en mesure d’assurer la pérennité du club et d’apporter son expérience pour participer à son développement.
Comment êtes-vous arrivé à négocier avec United World Group ?
Une fois la décision prise, j’ai été chargé de trouver le bon interlocuteur. J’ai rencontré plusieurs acteurs intéressés. Lorsque j’ai discuté avec United World Group, j’ai rapidement eu la conviction que nos deux visions étaient compatibles. Ma feuille de route était de trouver pour Châteauroux un groupe professionnel de haut niveau et de préserver l’identité du club. C’est ce qu’a fait United en Angleterre avec Sheffield United, en Belgique avec Beerschot. Le groupe a une expérience importante dans la gestion des clubs pour avoir déjà investi également à Alhilal United (Émirats Arabes Unis) et Kerala United (Inde). J’ai rencontré Abdullah Al-Ghambi (PDG du groupe United World Group, ndlr) à plusieurs reprises à Genève, où se trouve le siège de la société. Face à moi, il y avait une entreprise dont le métier est de faire progresser, à tous les niveaux, les clubs dont lesquels elle investit et pas uniquement intéressée par une stratégie de trading de joueurs. Après plusieurs semaines de discussions, une délégation est venue à Châteauroux. J’ai organisé des rencontres avec les responsables des collectivités et les partenaires du club pour que tout le monde comprenne l’intérêt de la démarche, à savoir qu’il ne s’agissait pas pour United de se mettre à la place de l’existant, mais d’apporter une valeur ajoutée.
Aujourd’hui, le club est en National, quel est le modèle économique de Châteauroux ?
Le club s’appuie sur la fidélité de ses partenaires. Il n’y a pas à Châteauroux un sponsor plus important qu’un autre ou d’une stature capable d’accompagner un club professionnel. Mais nous pouvons compter sur le soutien de 250 sponsors, en majorité des PME. Ils ont compris que la Berrichonne était arrivée en bout de course financièrement. L’intérêt d’United était une opportunité à saisir.
L’arrivée d’United World a surpris les observateurs. Qu’est-ce qui a conduit le groupe à s’intéresser à la Berrichonne ?
Le club dispose de plusieurs atouts, dont une bonne situation financière, sans dette. Ce qui n’est pas forcément le cas de beaucoup de clubs en France. La base de travail est saine avec un centre de formation de qualité et reconnu. Nous venons d’inaugurer de nouveaux locaux pour accueillir le futur siège social et le centre de formation de La Berrichonne football. Ce chantier avait été lancé bien avant l’arrivée d’United. Un gage de sérieux dans la gestion du club.
Depuis l’officialisation de l’opération il y a un an, comment fonctionnez-vous avec United ?
Ils font grandir le club. Même si sportivement nous n’avons pas encore les résultats escomptés. United participe à la structuration du fonctionnement du club. Notamment au niveau du marketing, de la communication et des finances. Le personnel sur place à Châteauroux travaille en étroite collaboration avec les équipes d’United à Genève et en même temps avec beaucoup d’autonomie. United est dans une politique de long terme. La stratégie est de maintenir les gens en place. On garde nos valeurs, notre identité. C’est un groupe qui travaille dans une certaine forme de discrétion. La famille princière saoudienne est très investie dans le fonctionnement du groupe puisqu’United appartient au prince Abdulla bin Mosaad. Sa fille, la princesse Reem, joue au football. Elle fait partie du Conseil d’administration. Elle est assez « businesswoman » et très pertinente dans ses analyses. Elle est venue à Châteauroux à plusieurs reprises. Le prince est lui aussi un passionné de sport.
Qu’est-ce qui a changé pour Châteauroux depuis l’arrivée de ce nouvel actionnaire ? Des échanges (pas seulement sportifs, mais sur le plan stratégique) ont-ils lieu avec les autres clubs détenus par United World Group ?
Il y a évidemment une énorme plus-value avec l’apport d’United sur le plan de sécurité financière. Nous sommes sûr de notre budget et non plus dépendant de la vente d’un joueur de l’effectif pour équilibrer les comptes. On ne prend aucun risque. L’autre force du groupe, ce sont les synergies internes possibles. La plus évidente est l’échange de joueurs entre les clubs en fonction des besoins et pour les aider à grandir et à acquérir de l’expérience. Mais aussi sur le plan marketing. La saison prochaine, Châteauroux et l’ensemble des autres équipes du groupe disposeront du même équipementier. Des sponsors communs pourraient également se développer dans le futur.
Derrière l’objectif de remonter en Ligue 2, quelle est l’ambition de Châteauroux : se stabiliser en Ligue 2 ou viser rapidement une accession à la Ligue 1 ?
L’ambition n’est pas de végéter en National. L’objectif de Châteauroux est de retrouver la Ligue 2. Beaucoup ne le savent pas, mais la Berrichonne est le club qui a disputé le plus de rencontres en L2* !
Et après la Ligue 2 ?
Step by step. Lorsque nous sommes montés en Ligue 1, lors de la saison 1997-1998, nous n’avions pas les reins assez solides pour assumer une telle promotion. Si on doit retrouver l’élite, United apportera son soutien pour consolider la place du club.
*En 41 exercices en L1, la Berrichonne a disputé 1482 rencontres.