L’Union des clubs professionnels de football (UCPF) s’est opposée à la publication du rapport annuel de la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) sur les comptes des clubs de Ligue 1 et de Ligue 2. Le syndicat des clubs a refusé de le valider. La faute au déficit cumulé de 130 millions d’euros annoncé (contre 34,5 millions la saison précédente) ? Pas seulement.
Il semble que la DNCG semble s’orienter sur une voie qui ne correspond pas à la réalité de la situation du football, qui risquerait de mettre en péril un certain nombre de clubs et qui ne met pas assez en évidence les points positifs du football français par rapport au football européen, indiquait Jean-Pierre Louvel, président de l’UCPF, avant la publication du rapport de la DNCG. C’est une nouveauté et nous ne sommes pas d’accord pour valider le rapport.
Jean-Pierre Louvel : pourquoi vouloir laver plus blanc que blanc ?
J’ai lu qu’il y avait 345 millions de déficit dans le compte d’exploitation, mais on oublie de prendre en compte les transferts, ajoutait le président du Havre. On ne prend pas en compte la valeur des joueurs, on ne prend pas en compte un certain nombre d’éléments, en prenant comme exemple le taux d’endettement du football français, quasiment nul et qui n’a rien à voir avec le taux d’endettement que l’on trouve en Espagne ou en Angleterre. De fait, celui-ci évolue peu, passant à 109 millions d’euros, contre 2 milliards pour le football anglais, 800 millions pour l’Espagne ou 400 pour l’Italie. On est d’accord avec le fair-play financier que veut mettre en place l’UEFA, mais pourquoi vouloir laver encore plus blanc que blanc ? Les inquiétudes ne sont pas en France alors qu’il y a des clubs étrangers, et de grands clubs, qui ne seraient pas qualifiés si le fair-play financier était appliqué aujourd’hui, justifie le président de l’UCPF. Le rôle de la DNCG est de garantir que les clubs peuvent aller au bout de la compétition et que l’équité sportive de la compétition n’est pas remise en cause, estimait enfin Jean-Pierre Louvel.
Que dit la DNCG de si choquant ? Rien ou pas grand-chose que les suiveurs du football professionnel français ne savent déjà. Avec 1,272 milliards d’euros, le chiffre d’affaires du football professionnel se stabilise (en léger recul de 4 millions d’euros). Grâce notamment à des droits TV dynamiques (NDLR : 47% du chiffre d’affaires), l’activité des clubs demeure résistante dans un contexte très difficile, écrit la DNCG. Toutefois, cette conjoncture a fini par se faire sentir sur des recettes sponsoring, billetterie ou loges en baisse (réduction des dépenses de communication des entreprises, du budget loisirs des ménages) alors que les charges d’exploitation (hors transferts) continuent leur progression, sur un rythme moins soutenu que ces dernières années, pour atteindre 1,617 milliard d’euros, soit +2%. Les efforts de gestion des clubs ont porté sur les charges variables et immédiatement opérantes, puisque les frais généraux sont stables, remarque la DNCG. La progression des salaires est ralentie par la signature de nouveaux contrats moins élevés que ceux conclus les années antérieures et pour une durée inférieure, continue le gendarme du football français. D’après la DNCG, les clubs font donc des efforts. Mais ils ont du mal à agir rapidement sur la masse salariale qui a encore augmenté de 8% pour les clubs de L1. Les clubs doivent honorer les anciens contrats déjà conclus à des salaires élevés et seuls 27% des joueurs de Ligue 1 arriveront en fin de contrat au 30 juin 2011.
Les capitaux propres fondent, les ventes de joueurs aussi
La perte historique essuyée en 2009-2010 a mangé une partie des capitaux propres des clubs de Ligue 1, passés de 265,6 millions d’euros à 189 millions. La facture a été allégée au niveau de l’ensemble des fonds propres par les actionnaires qui ont injecté de la trésorerie, abandonné certaines créances (près de 25 millions d’euros apportés par ce biais) et procédé à des augmentations de capital. Un régime difficile à tenir, même à moyen terme.
Pour la saison en cours, les clubs se montrent étonnamment optimistes. Ils tablent en effet sur une perte réduite à seulement 10 millions d’euros pour la Ligue 1 et la Ligue 2 ! Problème, cette prévision repose sur un objectif de 264 millions d’euros de plus-values sur les transferts. En l’absence d’une diversification suffisante des revenus, l’équilibre des comptes repose encore sur cette recette aléatoire. Le problème, c’est que les clubs ne maîtrisent pas ce marché, devenu subitement moins florissant en 2009-2010. Le résultat des opérations de mutations a chuté de 41% à 125 millions d’euros contre 215 millions la saison précédente.
Les clubs étrangers ont en effet beaucoup moins acheté. La DNCG remarque aussi que les clubs de Ligue 1 étaient nettement plus rentables et moins dépendants des transferts avant l’actuel contrat de droits TV. En effet ils arrivaient à équilibrer leurs comptes avec seulement 100 millions d’euros de résultat des opérations de mutations. Or les clubs sont en retard cette saison sur leur plan de marche. Comme l’année dernière. Avant le mercato hivernal, seul 41% des plus-values sur cessions de joueurs avaient effectivement été réalisées contre 75 à 80% d’habitude, à la même date, souligne la DNCG. S’ils veulent gagner leur pari, les clubs doivent donc engranger 150 millions d’euros de plus-values sur les transferts effectués d’ici à la fin de la saison. Peu probable.