En l’espace d’une semaine, le Real Madrid a dégainé 159 millions d’euros pour déloger Cristiano Ronaldo de Manchester United et Ricardo Kaka du Milan AC. En attendant de faire un nouveau chèque de quelque 40 millions d’euros au FC Valence pour l’Espagnol David Villa, le club madrilène démontre que le crédit bancaire reste actif en Espagne. Investissement audacieux ou coup de folie ? Le point sur les premières analyses… et les nombreuses réactions. Retrouvez également le Top 10 des records de transfert dans le monde et en France.
Les réactions se multiplient depuis l’annonce stupéfiante du transfert de Cristiano Ronaldo au Real Madrid pour quelque 94 millions d’euros, en pleine crise économique. En vacances à Los Angeles, Cristiano Ronaldo a qualifié d’historique son transfert. Un tel montant c’est une belle somme d’argent, a commenté le Portugais, ignorant le tollé provoqué par cet événement dans les rues d’Espagne, où le taux de chômage atteint 17%.
La folie dépensière du Real Madrid sur le marché des transferts va en effet à contre-courant de la période de crise économique. Elle va contribuer à une inflation des montants des transactions et des salaires dans le football. Pour Angel Barajas, professeur de finance et de comptabilité à l’Universi-té de Vigo et spécialiste de l’économie du football, le moment est mal venu de dépenser des sommes colossales en transferts et en salaires, qui pèsent sur plusieurs années, alors que la crise économique freine le développement des revenus. Il faut garder à l’esprit que le football est proche de la maturité en tant qu’activité économique et cela implique qu’il est toujours plus difficile de générer des revenus, analyse l’expert.
La dette du Real est colossale
Florentino Pérez, qui a fait fortune dans l’immobilier, compte financer ses acquisitions par les revenus marketing générés par les nouvelles stars. Mais en attendant les retombées de ses investissements, c’est bien la dette du Real, déjà forte de plus d’un demi-milliard d’euros, qu’il alourdit de 153 millions, montant emprunté auprès de deux banques espagnoles pour financer ses acquisitions estivales sur le marché des transferts. Le président du club madrilène contribue aussi à une inflation malvenue des montants des transactions et des salaires. Porte-parole de la Ligue espagnole de football professionnel, Juan Carlos Santamaria Gonzalez souligne que, dans tous les secteurs économiques, les entreprises recourent à la dette pour financer leurs activités. Il faut songer que l’argent investi par le Real Madrid et d’autres clubs dans des joueurs permet à d’autres clubs d’effectuer des investissements ou de couvrir d’autres besoins, a poursuivi ce porte-parole. C’est toujours positif quand un marché apporte la preuve de son dynamisme. Certes, mais les salariés espagnols, pour qui le robinet du crédit est fermé, ne peuvent-ils pas se sentir lésés ?
Le Real Madrid vit sous la pression permanente de ses supporteurs : il doit à tout prix remporter des trophées. Ce qui le conduit à adopter une politique risquée. La capacité que Florentino Pérez prête aux joueurs vedettes de générer sans cesse plus d’argent ne serait-elle pas exagérée ? Même si le club a une grande capacité à générer toujours plus de recettes, les coûts de fonctionnement du club ne dépasseront-il pas ses revenus ?
Une avalanche de réactions
Michel Platini se dit interpellé par l’enchaînement presque quotidien des transferts mirobolants, faisant référence sans les citer à ceux de Kaka et Cristiano Ronaldo au Real Madrid. Le football européen fait face à de dangereux défis financiers, explique le président de l’UEFA. Cet engrenage pose de nouveau et de façon aiguë la question du fair-play financier et de l’équilibre de nos compétitions.
Voilà pour la version soft. D’autres sont allés beaucoup plus loin, à commencer par Marie-George Buffet. La secrétaire nationale du PCF et ancienne ministre des Sports s’est dite scandalisée par les montants engagés pour les transferts de joueurs de football en pleine période de crise. Il faut d’urgence qu’il y ait une décision prise par l’Union européenne de football de mise en place d’une direction de contrôle financier des clubs, surtout qu’on sait que le Real n’est pas en si bonne santé financière et qu’il a fallu à plusieurs reprises que les dettes soient effacées, a-t-elle ajouté.
Le président de la Ligue de football professionnel, Frédéric Thiriez, pourtant défenseur du foot libéral a dénoncé pour sa part les sommes injustifiables et incompréhensibles versées par le Real Madrid. Ce type d’excès finira par conduire le football européen dans le mur, a-t-il ajouté. Certaines voix s’étaient élevées lors du passage de Zinedine Zidane au Real en 2001 pour dire la même chose. On connaît la suite.
Vers une DNCG européenne ?
Jamais en retard d’une proposition, Bernard Laporte, qui s’est également dit choqué, envisage de limiter le montant de ces transferts. Je fais partie de ceux qui disent qu’on a besoin d’une économie du sport forte, mais encadrée et régulée. Je propose deux choses, qu’on limite le montant des transferts partout en Europe, et, la Ligue Nationale de Rugby est en train de le faire, qu’on limite les salaires des joueurs en Europe voire la masse salariale globale des clubs. Ça redonnerait une véritable incertitude sportive.
Dans ce concert de réactions, on retiendra celle du ministre britannique des Sports Gerry Sutcliffe que le départ de Cristiano Ronaldo de Manchester inquiète. Ce sont des sommes astronomiques. Si on prend du recul, ce transfert, ajouté à celui de Kaka (ndlr: pour 65 millions d’euros) est une source d’inquiétude pour nous, a déclaré Sutcliffe, originaire de Manchester et supporteur affiché de United. Ces sommes sont tout simplement au-delà de la compréhension de la plupart des supporteurs ordinaires. Je suis inquiet de voir un petit groupe de clubs riches devenir encore plus riche et que cela nuise à l’équilibre du football, a-t-il encore mis en garde. Ironie du sort, le football anglais qui écrase l’Europe depuis plusieurs années avec sa livre sterling, se retrouve comme l’arroseur arrosé…
Nous avons aimé aussi le commentaire au sommet de l’Etat portugais. Selon le président du Portugal, Anibal Cavaco Silva, la somme promise par le Real Madrid à Manchester United dépasse les limites du raisonnable. Payer presque 100 millions d’euros pour le transfert d’un joueur ne m’a jamais traversé l’esprit, a déclaré le chef de l’Etat à la presse lusitanienne. J’aurais préféré que le Portugal soit davantage connu pour l’innovation, pour sa modernité, pour sa compétitivité.
Sepp Blatter n’est pas choqué
Mais que voulez-vous répondre au président de la Fédération internationale de football (FIFA), Sepp Blatter, lorsqu’il déclare : Il y a dix ans, un tableau de Picasso a été vendu aux enchères chez Sotheby’s à Londres pour plus de 100 millions. Et qu’est-il advenu du tableau ? Il a été rangé quelque part où personne ne peut le voir. Un footballeur, on peut le voir une ou deux fois par semaine. Il faut mettre (le prix du transfert) dans son contexte, celui du football actuel et du prix que valent les choses dans notre société. A méditer…
Le Real Madrid devancé par le Milan AC en Chine
Le Real Madrid n’est pas (encore ?) le club n°1 partout. Le Milan AC reste le club préféré des fans chinois de football, devant le Real Madrid et Manchester United, selon une étude TNS Sport. Quelque 38% d’entre eux ont cité le club italien parmi leurs préférés, avant le Real Madrid (22,4%) et Manchester United (21,6%), selon la dernière livraison du Baromètre sur le sport en Chine réalisé depuis 2003 par TNS Sport. Le classement n’a pas changé par rapport à l’an dernier, mais un changement sensible est la présence croissante des clubs chinois parmi les 15 clubs les plus cités, a souligné Pierre Justo, directeur général de TNS Sport Asia/CSM Media Research. Cela montre probablement un renversement de la tendance des Chinois en ce qui concerne leur intérêt vers les clubs étrangers et une importance plus grande accordée au football local, a-t-il estimé. Parmi le top 15 des plus cités figurent dix clubs européens (quatre pour l’Angleterre, trois pour l’Italie, deux pour l’Espagne et le Bayern Munich pour l’Allemagne) et cinq chinois.
Méthodologie : Le Baromètre est réalisé auprès d’un public représentatif de la population urbaine âgée de 15 à 54 ans dans les 11 principales villes de Chine.
MONDE De A Année Montant
1 Cristiano Ronaldo Man._Utd Real_Madrid 2009 94
2 Zinedine Zidane Juventus Real_Madrid 2001 75
3 Ricardo Kaka Milan Real_Madrid 2009 65
4 Luis Figo Barcelone Real_Madrid 2000 61
5 Hernan Crespo Parme Lazio 2000 56
6 Gaizka Mendieta Valence Lazio 2001 48
7 Rio Ferdinand Leeds Man._Utd 2002 47
8 Andrei Shevchenko Milan Chelsea 2006 46
9 Juan_Sebastian Veron Lazio Man._Utd 2001 46
10 Ronaldo Inter Real_Madrid 2002 45
FRANCE De A Année Montant
1 Michael Essien Lyon Chelsea 2005 38
2 Didier Drogba Marseille Chelsea 2004 33
3 Nicolas Anelka Real_Madrid PSG 2000 33
4 Ronaldinho Paris Barcelone 2003 30
5 Franck Ribéry Marseille Munich 2007 26
6 Mahamadou Diarra Lyon Real_Madrid 2006 26
7 David Trezeguet Monaco Juventus 2000 23
8 Sylvain Wiltord Bordeaux Arsenal 2000 23
9 Severino Lucas Paranaense Rennes 2000 22
10 Florent Malouda Lyon Chelsea 2007 20