Les clubs de football professionnels n’ont jamais été si économiquement chahutés qu’en cette rentrée, affaiblis par une activité poussive sur le marché des transferts et par la possible explosion de la bulle des droits télé en 2012.
Début septembre, le quotidien l’Equipe confirmait le retrait redouté d’Orange des futures enchères aux droits télés, achevant ainsi de plomber le moral de présidents de clubs déjà groggy par une saison record en terme de pertes, 140 millions d’euros en Ligue 1 pour 2009-2010 selon le journal.
Sans parler des joueurs. Ce sont désormais quelque 400 pros qui sont aujourd’hui sans club à l’orée de la saison. Du jamais vu.
Après un été commercial pourri, à peine éclairé d’une paire de gros transferts -Gourcuff à Lyon, Rémy à l’OM-, après l’abolition, au soir de la saison passée, du droit à l’image collectif (DIC, qui permettait aux clubs d’économiser 30% de charges soit environ 35 millions), l’annonce de la chaîne de France Telecom, parrain de la Ligue 1, a donc provoqué une fièvre prévisible.
Télé-dépendance
On savait que cette situation économiquement illogique n’allait pas durer, note Lionel Maltese, professeur en marketing sportif à Euromed. La France, avec un championnat de moindre qualité, avait des droits télé nettement supérieurs à d’autres de meilleur niveau, l’Allemagne par exemple.
Le retour à une certaine logique commerciale en 2012 – avec Canal Plus plafonnant son offre au niveau actuel (465 millions) et le retrait d’Orange qui créerait un manque à gagner de 203 millions – révèlerait en tout cas la grande faiblesse du modèle économique des clubs français: la télé- et dans une moindre mesure la transfert-dépendance.
C’est hallucinant que les clubs, qui sont quand même des PME, dépendent de ressources non contrôlables: des partenaires qui peuvent les lâcher, des acheteurs qui peuvent bouder les stades, des joueurs qui peuvent du jour au lendemain refuser de sortir d’un bus ou se blesser, poursuit Maltese.
Pour lui comme pour tous les experts, le salut passe par des investissements dans ces produits que les anglo-saxons nomment money-back guarantees, autrement dit des stades, des infrastructures, des centres de formation. Du solide et concret, quoi!
Le foot, c’est comme l’immobilier
En décrochant l’Euro 2016, la France s’est assurée pour un futur proche des stades multi-fonctions appelés à générer de forts bénéfices, comme ses voisins. Mais il faut tenir jusqu’à cette échéance. Il y aura une période difficile jusqu’en 2016, prévient Michel Seydoux, président du club de Lille et de la commission marketing de la Ligue du football professionnel (LFP).
Pour la vivre au mieux, la LFP a tout envisagé. Y compris créer sa propre chaîne ou racheter Orange Sport afin de compenser le manque à gagner généré par le retrait de son second diffuseur.
Sans convaincre. Ce n’est pas le métier de la ligue de créer une chaîne, juge Lionel Maltese qui, comme nombre de présidents de clubs de premier plan comme Seydoux ou Jean-Michel Aulas (Lyon), mise sur un sursaut de dernière minute du client historique, Canal Plus.
C’est comme pour la négociation d’une maison, note Maltese. Si vous savez que le vendeur doit vite déménager, vous êtes en position de force. Tout le monde sait que la Ligue est en mauvaise passe… Il est donc urgent d’attendre pour les patrons des clubs français.