Bridgepoint a conclu un accord pour l’acquisition d’Infront Sports & Media, société suisse basée à Zoug, spécialisée dans le marketing des droits sportifs. Bridgepoint rachète 100 % des actions d’Infront. Alors que le Qatar était intéressé par le dossier, le fonds d’investissement l’emporte en misant 600 millions d’euros sur l’opération.
Dans la perspective de la Coupe du monde de football 2022, dont il sera le pays organisateur, le Qatar tisse une toile impressionnante dans le monde du sport. En quelques semaines, le Paris Saint-Germain, les droits audiovisuels internationaux du championnat de France de football et même une partie des droits domestiques de la Ligue 1, sont tombés dans la corbeille de l’émirat, via son fonds souverain QIA. Cependant, malgré ses moyens colossaux, QIA n’a pas réussi à reprendre l’agence suisse de marketing sportif.
Infront Sports & Media avait été constituée il y a dix ans par Robert Louis-Dreyfus et Klaus Jacobs sur les décombres de l’empire Kirch. Infront avait était mise en vente par les héritiers des deux capitaines d’industrie. Suite à une longue période de croissance et une année 2011 de très forte activité, Infront occupe aujourd’hui une solide position dans le domaine du marketing sportif et représente aujourd’hui plus de 120 détenteurs majeurs de droits sportifs, en contribuant à 2.300 événements journaliers par an explique le groupe. Parmi les événements en question, il y a la Coupe du monde de football. L’agence a commercialisé les droits médias des éditions 2002 et 2006 et se charge, entre autres aujourd’hui, des droits asiatiques de la Fédération internationale de football (FIFA). Un privilège discuté. Infront étant dirigé par Philippe Blatter, neveu de Sepp Blatter, le président de la FIFA.
La société produit les images de la Ligue 1
Mais Infront ne vit pas que du Mondial. Avec une présence en Europe et en Asie, la société gère un portefeuille diversifié de droits dans le domaine des sports d’hiver, du football et des sports d’été. Infront Sports joue également un rôle déterminant dans la production média. Son activité se divise en quatre parties sensiblement équivalentes. Le football avec les droits de la fédération allemande, de la ligue italienne (Lega Calcio) et les droits divers clubs comme le Milan AC, Schalke 04 ou le Werder de Breme. Viennent ensuite les sports d’hiver avec les fédérations internationales de ski et de hockey sur glace. Puis les sports d’été comme le volley-ball, le handball et le basket chinois. Enfin, Infront réalise la production audiovisuelle des grands événements. Il y a le Mondial de football, mais également le championnat de France de Ligue 1.
Pour un fonds d’investissement, Infront possède des caractéristiques intéressantes. Environ 80 % de son chiffre d’affaires est acquis dès le 1er janvier et le taux de renouvellement des contrats avec les détenteurs de droits atteint 90 %. Bridgepoint connaît ce métier. Le fonds possède depuis cinq ans la société espagnole Dorna, qui gère les Grands Prix de moto. D’ailleurs, on remarquera que le numéro 1 mondial, IMG, est lui aussi détenu par un fonds d’investissement : Forstmann Little.
On estime que le marché des droits sportifs est tenu par trois mastodontes. IMG (qui serait en passe d’être mis en vente, ndlr), qui pèse environ 1,5 milliard d’euros de chiffres d’affaires. Le numéro deux mondial est donc Infront Sports avec 600 millions de chiffres d’affaires et, à la clé, une marge brute d’exploitation estimée entre 10 % et 15 %. Ce dernier devance nettement le numéro trois, Sportfive, racheté en 2006 par le groupe Lagardère pour 865 millions d’euros. Sportfive est en nette perte de vitesse. En 2010, son activité a chuté de 23 % à 396 millions d’euros. Pourtant, Arnaud Lagardère, gérant en commandite du groupe Lagardère, n’entend pas capituler. Il a réaffirmé récemment sa conviction que le marché des droits sportifs serait le relais de croissance du groupe dans quelques années.
Si les perspectives lui semblent aussi intéressantes, c’est d’abord par la taille de ce marché. Le marché mondial des droits sportifs est estimé à 121 milliards de dollars pour 2011. Celui des droits médias et de parrainages représenterait 56 milliards. Mais si ce marché croît encore sur un rythme de 4 à 5 % par an, il est confronté à un phénomène de désintermédiation. De plus en plus, la FIFA, le CIO ou l’UEFA déploient leur propre département de commercialisation. Mais il s’agit ici de grands détenteurs de droits, disposant des moyens nécessaires pour vendre directement leurs droits.
Toutefois, en misant un tel montant sur Infront Sports (la transaction est estimée à 600 millions d’euros), Bridgepoint estime qu’il reste d’importants relais de croissance. Sur le plan géographique tout d’abord. Très implanté en Europe et en Asie, Infront doit encore conquérir l’Amérique du Sud, continent très dynamique avec la Coupe du monde 2014 et les JO 2016 au Brésil. Pour Philippe Blatter, Bridgepoint s’est pleinement engagée à contribuer activement aux ambitieux projets d’expansion d’Infront et à appuyer notre équipe internationale.
La valorisation des droits internet constitue également un axe de croissance possible. Enfin, Bridgepoint ne cache pas qu’il se portera candidat lors de la remise en jeu des droits sportifs détenus par Sportfive, comme la Coupe d’Afrique des Nations. Avec Bridgepoint en tant qu’actionnaire, nous sommes prêts à tirer parti des nombreuses opportunités supplémentaires qui se présentent actuellement sur le marché, prévient le responsable d’Infront Sports.