Selon un rapport commandé par l’UEFA, la dette des clubs évoluant en Premier League dépasse celle de l’ensemble des autres clubs européens de premières divisions réunis. L’étude est basée sur les bilans de la saison 2007-2008. La situation ne s’est sans doute pas améliorée depuis.
Intitulé Le paysage financier du football de club européen, ce rapport s’intéresse aux bilans des 732 clubs disposant d’une licence UEFA pour disputer une compétition européenne. Le document révèle que la dette globale des clubs de Premier League avoisine les 3,4 milliards de livres sterling (3,8 milliards d’euros), soit 56% de la dette totale des clubs européens. Une partie de la dette à long terme correspond à la construction de nouveaux stades, comme celui d’Arsenal, affirme le rapport. Mais l’essentiel de cet endettement est surtout lié au rachat de Manchester United et de Liverpool par les hommes d’affaires américains, respectivement la famille Glazer à Manchester, George Gillett et Tom Hicks à Liverpool.
L’élément crucial, ce n’est pas le montant absolu de la dette, mais la capacité que l’on a à l’honorer
La dette combinée des clubs de 1re division anglaise est près de quatre fois supérieure à celle du Championnat d’Espagne (Liga), le 2e plus endetté en Europe.
D’après le document de l’UEFA, les 3,8 milliards de livres d’actifs (4,3 milliards d’euros) de la Premier League représentent 48% de la richesse des clubs sur le continent européen. Ce qui fait dire à un porte-parole de la Premier League : L’élément crucial, ce n’est pas le montant absolu de la dette, mais la capacité que l’on a à l’honorer.
Portsmouth, premier club de Premier League en redressement judiciaire
Ce qui n’est plus le cas de Portsmouth, endetté à hauteur de 70 millions de livres (environ 80 millions d’euros), voire plus. L’actuel lanterne rouge du championnat a été placé la semaine dernière en redressement judiciaire. L’administrateur de Portsmouth redoute que la dette tourne autour de 78 millions de livres. Je vais probablement avoir besoin d’une semaine supplémentaire pour aller au fond des choses et connaître les chiffres exacts. Mais j’imagine que cela devrait tourner autour de 78 millions de livres, a déclaré sur la BBC Andrew Andronikou. Le gestionnaire désigné par la justice britannique a par ailleurs prévenu qu’il voulait examiner de près les transferts de joueurs qui ont officiellement rapporté près de 100 millions de livres au club cette saison ! Tout le monde se demande comment Portsmouth a pu générer autant de revenus de la vente de joueurs et rester avec des dettes, s’étonne Andronikou qui compte décortiquer chaque transfert, un par un. Portsmouth entre donc dans l’histoire comme le premier club de Premier League à subir une telle mesure. Sans cette décision, faute de repreneur, une mesure de liquidation judiciaire aurait sans doute été prononcée par la Haute Cour de justice britannique devant l’incapacité du club à rembourser des impayés au fisc britannique.
Le placement en redressement judiciaire protège de ses créanciers un club qui peine à payer ses joueurs depuis le début de la saison. La mesure s’accompagne d’une sanction sportive. Conformément au règlement du championnat d’Angleterre, le club écope d’un retrait de neuf points, ce qui condamne Pompey, actuel dernier du classement, à la 2e division la saison prochaine. D’autres clubs pourraient imiter Portsmouth. Hull, Wigan et West Ham connaissent également d’importantes difficultés financières.
Autre constat dressé par le document de l’UEFA : la corrélation très étroite entre la puissance financière d’un club et ses résultats sportifs. La glorieuse incertitude du sport en prend un coup. Au sein des 53 fédérations affiliées à l’UEFA en 2008, dans 66% des cas, le club national le plus riche a terminé à l’une des deux premières places de son championnat, remportant les championnats dans 18 pays et finissant deuxième dans 13 autres cas. Dans l’autre sens, les champions nationaux ont déclaré soit le revenu le plus haut soit les coûts salariaux les plus élevés dans la moitié des ligues. Dans chaque ligue, les quatre plus grandes équipes ont des revenus 3,9 fois supérieurs à ceux des autres clubs en moyenne.
22% des clubs déficitaires présentent un déficit supérieur à 20% de leur chiffre d’affaires
En 2008, les 732 clubs étudiés ont généré 11,5 milliards d’euros de revenus. Les cinq ligues majeures cumulent 66% de l’activité. Sur l’ensemble des clubs, les principales sources de revenus concernent la télévision (36%), puis la publicité et le sponsoring (25%), la billetterie (22%) et enfin le poste autres recettes (17%). Le poste le plus important, celui des droits TV, est composé à 88% par les revenus de diffusion générés par les cinq plus grandes ligues.
Malgré un niveau de revenu colossal, et bien que la moitié des ligues aient déclaré une croissance de leurs revenus annuels de plus de 10% et en dépit des conditions économiques défavorables de 2007, les clubs examinés ont généré 578 millions d’euros de pertes cumulées contre 515 millions d’euros en 2007. 47% des clubs sont en perte. Et 23% d’entre eux affichaient même un déficit supérieur à 20% de leur chiffre d’affaires. Car si les recettes ont progressé de 4,8% par rapport à 2007, les coûts sont montés de 11% dans le même temps. L’inflation des salaires des joueurs en est la principale cause avec une hausse de 18% en un an, à 7,1 milliards d’euros. Dans 57 cas, le niveau de la masse salariale dépasse de plus de 100% les recettes du clubs. Pour les clubs qui ont établi une ventilation de ces coûts, le rapport entre les dépenses dans ce domaine était de 85% pour les joueurs et 15% pour le reste du personnel. Pour ceux qui ont encore détaillé les salaires des joueurs, le rapport était de 19% de part variable contre 81% de part fixe.
Au total, les dépenses des clubs cette année-là ont atteint 12,1 milliards d’euros.
Le tableau de bord européen met enfin en lumière l’énorme fossé financier entre les pays et les clubs par le fait que les 10% des clubs les plus puissants ont déclaré plus de 67% de tous les revenus et versé 70% de tous les salaires. D’après le document, les dix clubs possédant le plus important pouvoir d’achat
ont consacré aux salaires et aux indemnités de transfert deux fois plus d’argent (1,82 milliard d’euros) que les dix plus grands clubs suivants (916 millions d’euros). La différence entre les clubs diminue au fur et à mesure que l’on descend dans la liste. Les clubs 11 à 20 ont ainsi dépensé 42% de plus que les clubs 21 à 30 (647 millions d’euros), etc.
Un chiffre parmi d’autres
La propriété du stade n’est pas répandue en Europe. Moins d’un club de première division sur cinq (17%) possède son propre stade. Les clubs propriétaires de leur stade prévalent sur les clubs locataires en Angleterre, Ecosse, Espagne, Irlande du Nord et Norvège uniquement. En France, un seul club de première division (Auxerre) est propriétaire de son stade.