Même si c’est tiré par les cheveux, la Commission européenne approuve l’acquisition de la société possédant les droits du championnat du monde de MotoGP, Dorna Sports, par le groupe américain Liberty Media, déjà propriétaire de la Formule 1.
L’opération avait été notifiée en novembre dernier à la Commission, gendarme de la concurrence dans l’Union Européenne. Il y a quelques années, un tel rapprochement avait été interdit par les mêmes autorités. En 2006, le fonds CVC avait été contraint par le gendarme européen de la concurrence de céder Dorna quand il avait voulu acquérir la holding qui contrôlait alors les droits commerciaux de la Formule 1. Mais le monde change. La Commission estime cette fois que « l’opération ne soulèverait pas de problème de concurrence ». Dans le cadre de son enquête, l’exécutif européen a notamment examiné l’impact de l’opération sur le marché des concessions de droits de diffusion de contenus sportifs. Elle a constaté que « les diffuseurs pourraient toujours acquérir d’autres contenus sportifs attirant un public comparable ou supérieur » sans craindre « que l’opération ne conduise à une hausse des prix pour la concession de licences de droits de diffusion d’événements de sports mécaniques ». Et en bout de chaîne pour le téléspectateur abonné… Finalement, elle a constaté que Liberty Media et Dorna n’étaient « pas des concurrents proches pour la concession de licences de droits de diffusion de contenus sportifs » sur plusieurs marchés nationaux, et que cette acquisition ne poserait donc pas de problèmes. On se demande bien comment la Commission est arrivée à cette conclusion avec une seule et même entreprise détenant les droits exclusifs de deux des plus grands championnats de sports mécaniques au monde… La seconde inquiétude concernait le fait que John Malone, principal actionnaire de Liberty Media, contrôle également Liberty Global, détenteur de médias en Belgique, en Irlande et aux Pays-Bas, avec le soupçon que ces derniers soient avantagés pour l’obtention des droits. La Commission a conclu que « M. John Malone n’exerçait pas d’influence déterminante sur Liberty Global et que, même si tel était le cas, le lien entre le MotoGP et les activités de Liberty Global créé par la concentration n’entraverait pas de manière significative l’exercice d’une concurrence effective ».
Annoncé au printemps 2024 sur la base d’une valeur d’entreprise de 4 milliards d’euros (dette incluse), ce rapprochement entre Liberty Media et le MotoGP est porteur d’espoirs de croissance pour le championnat deux-roues, en quête de plus de notoriété. Liberty Media va acquérir 84% du détenteur des droits du MotoGP, Dorna Sports, les dirigeants actuels de l’entreprise basée à Madrid conservant les 16% restants. « L’accord devrait être finalisé au plus tard le 3 juillet 2025, ouvrant une nouvelle ère pour notre sport », précise le MotoGP dans un communiqué. « Le MotoGP est un actif sportif de premier plan hautement attractif avec des courses incroyables, dispose d’une base de fans passionnés et présente un profil de flux de trésorerie solide », d’après le PDG de Liberty Media, Derek Chang. « Nous pensons que ce sport et cette marque ont un potentiel de croissance significatif, que nous allons tenter de débloquer en approfondissant la relation avec le coeur de sa base de fans et en attirant une audience globale élargie », développe-t-il. « Liberty est le meilleur partenaire possible pour notre sport et pour toute la communauté du MotoGP », ajoute Carmelo Ezpeleta. Le PDG de Dorna depuis 1998 continuera de gérer le MotoGP, ainsi que le WorldSBK et leurs catégories annexes, avec ses équipes.
« Liberty Media peut apporter beaucoup de choses pour faire avancer le MotoGP », estimait le Français Hervé Poncharal, président de l’association des équipes, interrogé en février par l’AFP. « Le profil de la Formule 1, les audiences, les calendriers, les investisseurs… tout a beaucoup évolué dans un sens positif », ajoutait le patron de l’écurie KTM-Tech3.


