Alors les monocoques ont été préparés pour trois à quatre mois de mer, certains concurrents du Vendée Globe n’ont pas passé le cap de la première semaine. Victimes d’accidents divers, ils ont été nombreux à abandonner durant les premiers jours de la course. Une catastrophe pour les partenaires, victimes collatérales de ces abandons prématurés ? Pas forcément. Certains se réjouiraient presque de l’effet médiatique.
Des vingt skippers au départ des Sables d’Olonne le 10 novembre, ils sont encore treize en lice. Pour une course aussi exigeante et piégeuse que le Vendée Globe, c’est un bon ratio. Même si cette septième édition a été frappée par une épidémie d’abandons lors des quinze premiers jours de course. Si sportivement, les partenaires touchés le regrettent, ils sont aussi plusieurs à avoir bénéficié de la loupe médiatique provoquée par l’abandon de leur skipper. En voile, il n’y a de la place que pour le premier… et pour celui qui casse.
Thierry Grimonprez, directeur de la communication de Bureau Vallée, le partenaire de Louis Burton, dit mesurer chaque jour les retours sur investissement induits par la brève épopée de son skipper : cinq jours seulement de course avant d’être renvoyé au port par un chalutier. On a plus que doublé l’investissement initial, se réjouit-il. Louis a provoqué un buzz incroyable, si c’était à refaire, on n’hésiterait pas, reprend Thierry Grimonprez.
Les médias parlent plus des bateaux à problèmes que de ceux qui avancent
Officiellement, la bonne ou mauvaise fortune de leur bateau ne pèse pas dans la stratégie des sponsors, qui la décident en amont d’une campagne estimée entre 1,5 et 2 millions d’euros par an. Bureau Vallée assure s’être préparé à l’éventualité d’un abandon. L’entreprise de matériel de bureau soutient Burton au moins jusqu’à fin 2013, date de la renégociation prévue du contrat. Bel, le groupe fromager, estimant ses objectifs atteints en termes de communication, avait annoncé la fin de son partenariat avec Kito de Pavant pour mi-2013, sans attendre la rencontre du marin à la Vache qui rit avec un bateau de pêche. A l’inverse, Maître Coq avait renouvelé avant le départ son soutien à Jérémie Beyou – neuf jours de mer en tout – et ce jusqu’à l’édition 2016 du tour du monde en solitaire. Durant la préparation du Vendée Globe et la grosse semaine de course, la marque de produits volaillers a enregistré, comme Bureau Vallée, des progressions en notoriété.
Tous les sponsors ciblent l’essentiel de leur communication sur l’avant départ, sur les trois semaines d’ouverture du Village et le départ, explique Gérard Lepage, président de Safran Sailing Team. Le bon déroulement d’une course, et a fortiori la victoire, sont une grosse cerise sur le gâteau, juge-t-il, confirmant qu’une avarie n’a pas forcément un effet négatif. Dans le dernier Vendée Globe, Marc Guillemot avait réparé dans des conditions hostiles. On peut d’autant plus communiquer là-dessus que les médias parlent plus facilement des bateaux à problèmes que de ceux qui avancent, reprend-il. Dans le cas de Safran, l’exercice a été périlleux cette année. La marque aéronautique avait en effet abondamment communiqué en amont du Vendée Globe sur la quille en titane censée procurer au bateau un avantage notable… avant qu’elle ne casse. Si pour la multinationale l’enjeu du Vendée Globe n’est pas financier, il est des entreprises pour qui le déroulé de la course est crucial. Savéol est de celles-là. A l’inverse de Bureau Vallée, la PME de produits maraîchers ne s’est pas remise de l’abandon de la Britannique Samantha Davies. Les investissements sont énormes par rapport au résultat, note Roger Capitaine, directeur général, qui a dépensé dans l’aventure 30% de son budget communication. La coopérative de maraîchers participait à son premier Vendée Globe. Aujourd’hui, notre implication dans la voile n’est pas réaffirmée, ajoute Roger Capitaine. Déjà dubitatif sur son engagement à la fin de l’année 2011, Savéol avait décidé de suivre Samatha Davies dans son projet Vendée Globe. Cette fois, le risque n’a pas payé. Dépité après l’abandon, le directeur général a pourtant changé d’humeur lors du retour du monocoque aux Sables d’Olonne. Avec tous les producteurs, on va débriefer et réfléchir à l’avenir mais notre souhait est de revenir ici dans quatre ans avec un bateau encore plus performant a-t-il confié. On va avoir de quoi de discuter dans les jours qui viennent pour essayer de remonter le projet et repartir dans quatre ans avec un bateau tout neuf et plein d’ambitions, a ajouté Jocelyn Merceron, Président du Groupe Satov, partenaire officiel du projet.