Ils sont partenaires, mais ils s’opposent sur bien des points. Avec le lancement surprise de son appel d’offres sur les droits de retransmission de la Ligue 1 pour la période 2016-2020, la Ligue de football professionnel (LFP) a soufflé sur des braises qui ne demandaient qu’à s’enflammer.
Lundi, le tribunal de grande instance de Paris devait se prononcer sur la légalité de la procédure anticipée par la Ligue de football professionnel (LFP) du lancement des enchères sur les droits de retransmission des matches de Ligue 1 pour les saisons 2016-2020. Le timing n’est pas acceptable, a souligné le patron de Canal+, Bertrand Méheut, dans un entretien avec le quotidien Le Figaro. La Ligue de football nous a vendu des droits pour quatre ans, jusqu’en juin 2016. Nous souhaitons pouvoir en profiter sereinement. Je ne comprends pas cette précipitation, a-t-il ajouté après avoir saisi l’Autorité de la Concurrence. Frédéric Thiriez, président de la LFP, a pourtant fait le tour des médias pour expliquer combien les clubs français avaient besoin de visibilité sur leur budget et sa volonté de voir la L1 combler son retard sur les autres championnats européens… C’est de bonne guerre. La chaîne de télévision cryptée estime qu’en anticipant de deux ans sur le calendrier prévisible, la LFP prend le risque de déstabiliser sa clientèle.
La procédure de Canal+ n’est pas la seule en lice. Canal+ réclame ainsi 293 millions d’euros à beIN Sports pour concurrence déloyale. La filiale de Vivendi avait porté plainte en juillet 2013, considérant qu’il y a distorsion de concurrence entre elle et la chaîne qatarie, financée par un fonds souverain aux ressources considérables, pour ne pas dire illimitées. La situation est paradoxale. Le même fonds permet aujourd’hui au Paris Saint-Germain d’être au niveau des principaux clubs européens, trois ans seulement après sa prise de pouvoir. Et c’est ce PSG que les abonnés de Canal+ veulent voir…
Tirs croisés des deux chaînes
beIN Sports rend coup pour coup. En quelques semaines, le diffuseur concurrent s’est mis d’accord avec TF1 pour retransmettre la totalité de la Coupe du monde au Brésil, puis a enlevé les droits de diffusion des prochains championnats du monde de handball et du championnat de France. Mais beIN Sports a manqué le rugby et son Top 14. Cette fois, c’est beIN Sports qui conteste la procédure d’attribution des droits devant les tribunaux. La chaîne Qatarie a saisi l’Autorité de la concurrence contre la Ligue nationale de rugby (LNR) qui a préféré contracté avec Canal+. La chaîne cryptée a obtenu l’exclusivité de la compétition pour les cinq saisons à venir, moyennant 355 millions d’euros. La chaîne Qatarie regrette l’absence de respect d’une procédure transparente de mise en concurrence équitable et loyale. La LNR avait décidé, début décembre, de dénoncer le contrat la liant à Canal+, diffuseur historique du Top 14, et de lancer un appel d’offres. Mais, à la surprise générale, elle l’avait brutalement suspendu le 10 janvier, à la veille de la date limite de dépôt des offres, fixée au 13 janvier. Avant de signer dans la foulée un accord pour cinq ans avec Canal+. Plus que le montant déboursé par Canal+, beIN Sports a été battue par le lobbying de la chaîne cryptée.
Principale responsable de cette bataille, la LFP se dit sereine devant les attaques de Canal+. Frédéric Thiriez, président de la ligue, y voit l’illustration du comportement habituel de Canal+ qui multiplie les procédures judiciaires depuis plusieurs années contre tous les acteurs de l’audiovisuel ou du marché des droits sportifs.