Le Groupe Partouche et le Grand Stade de Lille, c’est déjà une longue histoire. Parce que le montant proposé est jugé insuffisant, parce que l’activité en question est éthiquement sensible, le casinotier ne sera sans doute jamais le partenaire naming de l’enceinte lilloise. Il s’étonne que sa proposition ne soit pas retenue.
C’est une décision qui ne fait pas consensus, même si la présidente de la communauté urbaine de Lille (LMCU), Martine Aubry, dit le contraire : que le stade porte le nom de Pierre Mauroy a sonné comme une évidence. Rendre hommage à Pierre Mauroy, décédé le 7 juin dernier, oui. Donner son nom à un stade de football, la chose surprend. S’il est vrai que le dossier du Grand Stade de la métropole lilloise a été lancé sous la présidence de l’ancien premier Ministre, alors à la tête de l’agglomération lilloise, c’est un peu contraint et forcé qu’il l’a conduit. Son premier choix était la rénovation de l’antique stade Grimonprez-Jooris. La justice stoppera net les velléités de travaux pour cause de trop grande proximité avec la citadelle de Vauban, classée monument historique. Pas de chance. Lorsque la décision de construire un nouvel édifice est prise, Pierre Mauroy soutiendra le projet de Nordpac contre celui d’Eiffage. Plus coûteux, c’est pourtant ce dernier qui sera choisi. Pas de chance encore.
Comme un pied de nez à l’histoire, LMCU choisit aujourd’hui de rebaptiser l’enceinte inaugurée l’été dernier au nom de Pierre Mauroy alors qu’un partenaire naming est attendu depuis des mois. Le groupe Partouche ne comprend pas cette décision. Le casinotier s’est déjà exprimé sur le sujet. Voulant acheter le naming du stade, il a formulé une offre de 2,5 millions d’euros par an. Un montant inférieur aux attentes de l’agglomération qui pilote le dossier, mais la seule offre existante à ce jour semble-t-il.
Notre offre restait valable la semaine dernière encore ! C’était un engagement ferme, un contrat. Même si depuis plusieurs mois, nous avions fait le deuil du naming. Nous avons fait une offre en bonne et due forme. Nous proposions 2,5 millions d’euros par an. A part par médias interposés, et de façon un peu virulente, nous n’avons jamais eu de réponse à notre offre, regrette Maurice Schulmann, le directeur marketing de Partouche, interrogé par France 3 Nord-Pas-de-Calais. Si encore, il y avait eu d’autres offres mais là… Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois. En fait, ils se sont cachés une partie de la réalité, poursuit le dirigeant de Partouche, pointant du doigt l’attitude de la Communauté urbaine dans ce dossier. Celle-ci va finalement s’asseoir sur l’apport d’argent frais que représente le naming. On s’est senti invisible. Selon eux, notre dossier ne méritait même pas d’être étudié. Il faudrait demander aux contribuables ce qu’ils en pensent… S’ils n’auraient pas aimé qu’avec 2,5 millions d’euros par an, on construise des crèches, des logements, qu’on améliore le transport… Et ce n’est pas démago de dire ça.
La culture à Lille, le foot à Lens
Pierre de Saintignon, vice-président de Lille Métropole Communauté Urbaine, en charge du dossier naming, avait effectivement indiqué, en novembre 2012, que l’offre de Partouche était insuffisante financièrement et que le nom (NDLR : Partouche Stadium) ne correspondait pas à l’identité et aux valeurs de (la) région. Isidore Partouche s’est pris un coup sur la tête en entendant ces mots, affirme Maurice Schulmann. Il est un homme du Nord, qui a beaucoup investi dans la région. Il y avait un côté affectif dans notre offre. Entendre que son nom ne peut pas être adossé au Grand Stade l’a blessé.
Déçu ne pas avoir été retenu, le sponsor et actionnaire du LOSC, le principal utilisateur du stade, juge ironiquement le choix de donner au Grand Stade le nom de Pierre Mauroy original et particulier. Reste la question : qui va assumer le manque à gagner de l’absence d’un partenaire naming ? Selon Martine Aubry, aucune entreprise dans le contexte actuelle n’est prête à dépenser autant d’argent (plus de 3 millions d’euros par an comme le réclame LMCU) pour avoir son nom sur le stade. Le manque à gagner serait comblé en partie par de l’argent public via le Conseil général du Nord et le Conseil régional.
La culture à Lille, le foot à Lens. Cette phrase de Pierre Mauroy prononcée pour la Coupe du monde 1998, que Lille n’a finalement pas accueillie, revient comme un boomerang aujourd’hui. Quinze ans plus tard, le musée du Louvre a ouvert une antenne à Lens, alors que Lille dispose du stade le plus moderne de France…