Canal+ a rédigé une note blanche pour dénoncer un conflit d’intérêt du Qatar, propriétaire du PSG et de beIN Sports. Le but : empêcher la chaîne de répondre au prochain appel d’offres pour les droits de diffusion de la Ligue 1. Objectif manqué, mais ce n’est que partie remise.
Cette note blanche était destinée aux pouvoirs publics pour les alerter d’une situation conflictuelle concernant un propriétaire de club qui est aussi un diffuseur. La note pourrait viser M6, propriétaire des Girondins de Bordeaux, mais elle est surtout dirigée contre beIN Sports, sa rivale dans la télévision payante. La chaîne cryptée dirigée par Bertrand Meheut avait dans l’idée d’empêcher beIN Sports de participer au futur appel à candidatures de la Ligue de football professionnel (LFP) pour les prestigieux droits de la Ligue 1. Celui-ci doit être lancé en 2015.
Dans sa note, révélée par Les Echos, Canal+ dénonce un conflit d’intérêt du Qatar sur le marché des droits audiovisuels de la Ligue 1. Le document, rédigé par Laurent Vallée, secrétaire général de Canal+ depuis mars dernier et qui auparavant siégeait à la LFP, explique que le Qatar cumule les qualités de vendeur et d’acheteur des droits audiovisuels de la Ligue 1. Canal+ indique que les droits audiovisuels de la LFP sont la propriété des clubs de football. Or, le Qatar est à la fois propriétaire du Paris SG et de la chaîne de télévision beIN Sports, qui diffuse la Ligue 1, compétition commercialisée par la LFP. Canal+ en conclut que le Qatar est à la fois acheteur et vendeur, et, ainsi, en conflit d’intérêt. Le document ajoute que le Qatar est également présent au sein de la LFP. Il y siège en effet via le PSG qui est membre de droit de la LFP. Le Qatar est ainsi présent aux trois niveaux clés de la négociation des droits de la Ligue 1 : il est le principal vendeur ; il est l’un des principaux acheteurs ; il peut exercer une influence déterminante sur le commercialisateur, conclut la note blanche. Y a-t-il beaucoup de marchés où un même groupe est à la fois vendeur et acheteur de droits avec, en plus, une présence au sein de la structure qui commercialise ? Cela nous paraît discutable, renchérit Laurent Vallée. Canal+ demande à jouer à armes égales avec Al Jazeera, reprend ce dernier. Un argument imparable mais contestable de la part de Canal+ qui était il y a peu encore (jusqu’en 2006) propriétaire du PSG… et diffuseur du championnat.
Pour la chaîne cryptée, la seule solution pour remédier à cette situation est un décret en Conseil d’Etat interdisant à une chaîne de télévision de participer à un appel à candidatures de la LFP, dès lors qu’elle est propriétaire d’un club de football. En somme, le Qatar devrait vendre le PSG s’il veut postuler au prochain appel à candidatures. M6 aussi, mais la puissance financière de la chaîne ne menace pas Canal+.
La note a été rapidement enterrée. Le ministère des Sports a repoussé les arguments : la situation de conflits d’intérêts contestée ne semble pas être établie. Ce n’est pas le PSG qui vend ses droits, mais la Ligue de Football Professionnel, sur la base de l’avis d’un comité de pilotage dont le PSG n’est pas membre, a-t-il ajouté.
Si la voie législative est repoussée, Canal+ a d’autres cartes en main. La chaîne a porté plainte contre beIN Sports devant le Tribunal de Commerce de Nanterre pour concurrence déloyale. Elle met en avant le niveau insuffisant de recettes de beIN Sports pour équilibrer ses comptes avec les achats de droits. Une décision est attendue pour cette année.